Le lendemain, Mimie la chaussette vit qu'elle était dehors sur le lino de la buanderie. C'était le petit matin. Elle reconnut le panier à linge en plastique bleu et, à travers les trous, interrogea le linge présent. La chemise qu'elle réveilla lui dit avec mauvaise humeur que non, ça faisait un certain temps qu'on avait plus vu de chaussettes comme elle par ici.
C'est alors qu'une culotte s'extirpa du tas de linges et cria à Mimie :
– Si, si. Moi je l'ai vue. Je sais où elle est. Dans la chambre de la petite, dans une boîte à bricolage. Elle y était encore hier.
Mimie la remercia chaleureusement et se dirigea vers la chambre de l'enfant de la maison. Elle connaissait chaque mètre carré du plancher qu'elle avait parcouru aux pieds de la fillette qui détestait mettre des chaussons.
Il ne lui fallut pas longtemps pour entrer dans la chambre, contourner le coffre à jouets et grimper dans le tiroir à bricolage.
Dès qu'elle apparut au dessus du rebord, un cri de joie l'accueillit :
– Mimie, c'est toi ! Je croyais t'avoir perdue !
Sa jumelle, Mumue, était là. Les deux chaussettes s'étreignirent très fort.
Mimie s'étonna :
– Mais que fais-tu dans ce tiroir soeurette ? Oh ! Comme c'est joli toutes tes décorations, ces boutons de nacre et ces fils de laine colorés !
– Oui, répondit Mumue. Je suis une marionnette maintenant et c'est assez amusant. Mais tu m'as tellement manqué ! Qu'est-ce que je suis contente que tu sois là !
Toutes à leur joie, elles n'avaient pas remarqué la petite soquette rouge en laine bouclette tapie au fond du tiroir et qui s'était rapprochée.
– Tu n'aurais pas vu ma sœur à moi par hasard ? demanda-t-elle à Mimie. Je suis sans nouvelles d'elle depuis des semaines.
– Mais si ! s'exclama Mimie. C'était même ma meilleure amie au pays des chaussettes orphelines.
– Pourrais-tu m'y conduire ? Moi je refuse de finir en marionnette ou pire, en rembourrage de coussin.
Mimie n'était pas très chaude pour retenter l'aventure en sens inverse, surtout maintenant qu'elle avait retrouvé sa sœur. Cependant la détresse de la soquette l'émut.
– D'accord ! Je te conduis jusqu'à la machine et je t'indiquerai comment retrouver ta jumelle, mais il faut partir tout de suite tant qu'il ne fait pas complètement jour.
Alors la courageuse petite Mimie guida la soquette jusqu'à la trappe et lui expliqua la marche à suivre pour se rendre au pays des chaussettes orphelines.
Elle terminait ses explications lorsqu'un bruit feutré de pattes souples et agiles se fit entendre.
Le monstre poilu était là, moustaches frémissantes, oreilles pointées dans leur direction.
Mimie l'avait déjà vu s'en prendre à un bouchon de plastique qui traînait par-terre. Le pauvre n'avait eu aucune chance et avait fini déchiqueté entre les griffes et les crocs du fauve. Alors elle cria à la petite
soquette :
– Vas-y ! Fais ce que je t'ai dit. Moi je vais l'attirer plus loin.
Elle se roula en boule, comme les chaussettes de sport l'avaient tant de fois obligé à le faire puis elle attira le monstre loin de la machine. Elle faillit bien se faire attraper mais se réfugia sous un meuble hors de sa portée.
Le chat, car c'était bien de lui dont il s'agissait, finit par se lasser et, à la fin de la journée, elle put sortir de sa cachette et rejoindre Mumue dans son tiroir.
Pour la première fois depuis des semaines, Mimie était heureuse. Sa sœur et elle papotèrent encore et encore puis, vaincues par le sommeil, finirent par s'endormir pelotonnée l'une contre l'autre.
Quand vous vous réveillerez
hier ira de l'avant
et demain sera aujourd'hui
d'ici-là bonne nuit à toutes & tous !